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lundi 14 septembre 2015

Les Tiers-Lieux : Des espaces de proximité pour créer et produire « en communs »

Source : Le Temps des Communs
Par Bernard Brunet

Les tiers-lieux sont des espaces de travail, dont la neutralité, la convivialité et le type de ressources mises à disposition (équipements, animation et conseil), permettent à leurs usagers de concevoir et/ou de fabriquer des biens ou des services, individuellement ou en équipes, tout en acquérant des connaissances et développant leur réseau de partenaires.

Implantés localement dans les quartiers et les territoires, ils constituent une alternative à la fois à l’entreprise conventionnelle et au travail indépendant. Issus le plus souvent d’une initiative entrepreneuriale privée ou d’une démarche citoyenne, ils peuvent également être soutenus voire initiés par la puissance publique.

Ils peuvent ainsi offrir des fonctions de coworking, de fabrication numérique (fablab) et de « bricolage/recyclage » (hackerspace, repair-café…), mais aussi répondre à d’autres besoins locaux grâce à une coopérative d’activités et d’emplois, un incubateur ou une pépinière de projets innovants, une conciergerie, un point d’accès aux services publics, une plateforme de rencontre en producteurs et consommateurs (AMAP, Ruche qui dit oui…), un lieu de création artistique…

Leurs usagers peuvent être des travailleurs indépendants ou des porteurs de projets, des salariés qui télé-travaillent pour leur entreprise, des associations ou des petites entreprises hébergées provisoirement ou durablement, voire des agents de service public (en milieu rural par exemple).

De nombreux tiers-lieux se dotent d’une charte qui rappelle leurs valeurs (open-source, développement durable, économie sociale et solidaire…) et d’une gouvernance démocratique qui permet à la communauté de ses usagers d’en gérer collectivement l’accès, le fonctionnement et le développement comme un (bien) commun.

Ces différentes caractéristiques font sans doute des tiers-lieux, des laboratoires préfigurant l’entreprise de demain, une (co-)entreprise collaborative capable de réconcilier la conception (design) et la fabrication (du prototype à l’objet sur mesure, capable de répondre de manière durable aux besoins spécifiques des utilisateurs locaux), permettant ainsi une relocalisation progressive de la production manufacturière et l’avènement d’une économie « distribuée » reposant sur des modèles ouverts et la coopération entre pairs.

« Véritable disruption » plutôt qu’une évolution du modèle économique capitaliste, cette perspective est indissociable de celle annoncée de la disparition du salariat conventionnel. Les « travailleurs » des tiers-lieux sont indépendants (et ne se reconnaissent plus dans la notion de « lien de subordination » qui caractérise le statut salarié), travaillent pour eux et pour plusieurs donneurs d’ordre, participent au cas par cas à des équipes de dimension variables qui se créent en fonction des projets.

Cependant le risque est grand que l’essor du travail indépendant se fasse au détriment de notre modèle protection sociale qu’il faudra alors réinventer, et pourquoi pas au sein des tiers-lieux en imaginant des formes de mutualisme et de solidarité entre pairs.

Ces différentes observations invitent bien évidemment aux questions et le cas échéant au débat contradictoire :

Les tiers-lieux constituent-ils une alternative crédible au modèle économique actuel ?
Leur nature, leur fonctionnement leur gouvernance en font-ils une forme de « communs » territoriaux et si oui, quelles sont les enclosures dont ils auront à se défier ?
Les tiers-lieux peuvent-ils trouver leur modèle économique et si oui avec quel équilibre entre les économies marchande, non marchande et non monétaire ?
Comment ouvrir les tiers-lieux au plus grand nombre alors qu’ils sont aujourd’hui principalement fréquentés par ce qu’il est convenu d’appeler des « créatifs culturels » ?
Les tiers-lieux doivent-ils imaginer de faire réseau entre eux pour mutualiser des moyens de développement et de solidarité ?
Les collectivités doivent-elles soutenir activement la création et le développement des tiers-lieux considérés comme un des nouveaux leviers du développement local ?

dimanche 14 juin 2015

Les ateliers coopératifs font leur révolution. Le cas d’Helios.

Source : MrMondialisation

Les ateliers coopératifs font leur révolution. Le cas d’Helios.
« Il s’agit avant tout de s’émanciper. Nous voulons contrôler ce que nous faisons. Nous ne voulons pas être seulement des consommateurs passifs. » (Justyna Ausareny). Toute une génération aspire à reprendre un certain contrôle sur la société. L’atelier coopératif fait partie de ces alternatives en marge, promotrices d’une économie collaborative et citoyenne qui se faufile partout dans le monde. La ville de Montréal ne fait pas exception…
Rue St Ferdinand, à St Henri. L’une des dernières rues de Montréal où les maisons ont conservé leur architecture du temps où tout le quartier était habité par des ouvriers. Avec ses cours où les gamins couraient après les poules, ses vieux portails en bois par où rentraient les chevaux, ses portes plus basses que la norme. Juste avant la rue St Ambroise, un immense bâtiment de briques, comme on en trouve beaucoup dans le quartier, où des artisans et artistes en tout genre louent des locaux et créent leurs ateliers. Samedi 9 mai, Helios Makerspace, un atelier coopératif, a organisé sa première rencontre d’artisans. Ce cas concret, situé à Montréal, offre une vision claire des potentialités du coopératif.
En Europe, en Asie, aux USA, en Afrique, le mouvement des ateliers coopératifs (appelé en anglais hackerspace, medialab ou makerspace) est bien implanté : de Boston à Toulouse, de Yogyakarta à Rio en passant par Lomé au Togo, des espaces communautaires s’ouvrent, dans des bâtiments high-tech ou des hangars, dans les métropoles comme dans des villages ou des petites villes. L’histoire est souvent la même : « Au début on n’avait qu’une table, deux chaises, un tournevis et un marteau… ». Quelques mois plus tard, le virus prend : les gens intéressés par l’électronique, l’art manuel ou digital, amènent leur matériel et viennent profiter de l’espace commun, la ville ou/et l’État offrent des aides. Au Canada on les trouve à Vancouver, Winnipeg, Ottawa, Toronto entre autres. À Montréal, le mouvement est tout jeune, et n’a pas encore capté l’attention des médias.
La réponse d’une génération
À l’image d’Helios, ces espaces coopératifs où professionnels et amateurs viennent partager savoir et invention, est la réponse de toute une génération fatiguée d’un capitalisme individualiste et de la surconsommation. Là où tout est fait pour isoler les individus et les mettre en compétition, ils créent des espaces communautaires d’entraide. Là où les gens sont poussés à être des consommateurs passifs, ils se réapproprient la fabrication : ils bidouillent, ils assemblent, ils jardinent, ils cuisinent.
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Comme les universités populaires, les jardins communautaires, les éco-villages ou les concerts de salon, les ateliers coopératifs sortent le savoir des institutions et des spécialistes pour le mettre à la disposition de tous. Ici pas de CV, pas de dossier, pas même besoin d’expérience : c’est l’envie et l’implication qui comptent. Le savoir ne passe que par le partage, par l’action, par l’expérimentation. C’est aussi le DIY (Do it yourself ) et le DIWO (do it with others).
De la réparation d’un monde à la préparation d’un autre
Cette nouvelle génération cherche à rétablir les équilibres que nous avons perdus : entre l’individualisme et la communauté, entre le virtuel et le manuel, entre la science et l’art, et brise les frontières entre amateurs et professionnels. Dans un atelier coopératif, tout part des rêves d’un individu. C’est le groupe qui l’aide à les réaliser. Le virtuel n’isole pas les individus, il leur permet de se rassembler. L’électronique et le manuel font bon ménage : ainsi Anthony Lapointe, membre de iMuFab, atelier de fabrication numérique de l’iMusée, a présenté aux journées portes ouvertes d’Helios son projet de créer une serre où les besoins des plantes en eau, en soleil et en air, seraient automatiquement détectés par un programme numérique.
Les ateliers coopératifs deviennent ainsi les laboratoires de projets de développement durable, attirant les créateurs du futur. Ainsi, Isabel Casares, une jeune chef-cuisinière mexicaine, a présenté cette même journée son projet de produits faits à partir de fruits et de légumes jetés par les supermarchés montréalais. Elle crée des confitures et des conserves et les revend dans les mêmes supermarchés, qui deviennent ses fournisseurs et ses clients. Les gaspilleurs deviennent les récupérateurs créant une boucle positive.
À Helios, les enfants sont tout autant bienvenus. Les ateliers coopératifs recréent le lien mutilé entre les générations. En présentant leur console de jeu maison, les frères Lamontagne ont raconté avoir voulu recréer pour leurs enfants ce que leur grand-père avait bidouillé pour eux. Retrouver le plaisir de fabriquer ses propres jeux… comme avant, avec les outils d’aujourd’hui.
« Chacun devient le déclencheur du rêve de l’autre. Créer un espace d’entraide qui permette à chacun de devenir un faiseur qui apprend, qui s’amuse, qui partage, cela fait des gens plus heureux. » Justyna Ausareny
Helios, un futur pionnier
Qu’on se le dise : dans quelques années, on parlera de l’espace Helios comme l’un des pionniers du mouvement des ateliers coopératifs à Montréal. À l’origine de ce projet, Le Lambert et quelques amis. Étudiants en génie à Concordia, ils exploitaient les laboratoires mis à disposition par l’université. À la sortie, le diplôme en poche, des rêves plein la tête, du savoir-faire dans les mains, ils perdent soudainement tout accès au matériel professionnel. C’est ainsi que les étudiants en arts et en sciences humaines quittent le cocon universitaire et se retrouvent sur un marché du travail impitoyable où les règles ne sont plus les mêmes, où il ne suffit pas d’être doué et de travailler fort pour réussir. Les ateliers coopératifs apparaissent alors comme les traits d’union essentiels entre la formation des écoles et l’offre du marché du travail.
Le jeune Lambert voyage à Boston et au Japon, et y découvre des ateliers coopératifs. De retour à Montréal, il crée avec ses amis l’espace Helios. Pendant ce temps-là, Justyna Ausareny, récemment élue codirectrice, découvrait ces mêmes espaces à Singapour, en Indonésie, au Népal et en Chine. De retour à Montréal, elle cherche… et trouve Helios. Elle rejoint les bénévoles puis l’équipe permanente dont les membres viennent du génie électronique, de la programmation informatique, des arts manuels, de la biologie, de la communication. Un terreau cosmopolite se met alors en place.
Lors des journées portes ouvertes, les questions nombreuses après chaque présentation témoignaient de la curiosité de chacun pour le travail de tous. Certains présentaient des prototypes pour changer un bout du monde, d’autres s’étaient donné le challenge de fabriquer eux-mêmes quelque chose d’original. Pour Lambert, c’est la rencontre entre des gens venant de milieux totalement différents qui crée des étincelles : « Quand des gens qui viennent de différentes disciplines se rencontrent, c’est là que les idées les plus incroyables, les plus folles et les plus intéressantes émergent. » Depuis, ce sont aussi des neuroscientifiques, des artistes, des médecins, des philosophes, qui sont passés par Helios pour relier leur expertise à la technologie.
Cet été, tout au long des mois de mai et de juin 2015, l’espace coopératif proposera des ateliers d’introduction et de perfectionnement en microsoudure électronique, ébénisterie, couture, design sur imprimante 3D, et bien d’autres choses.
Un autre monde se prépare ici et maintenant
Concrètement, à Helios, vous pouvez par exemple apprendre en moins d’une heure à changer votre écran de téléphone brisé. Vous pouvez aussi imprimer en 3D cet objet impossible à trouver dans le commerce. Vous pouvez vous former à une multitude de domaines professionnels des plus basiques au plus complexes. Si l’on peut appliquer une seule idéologie aux ateliers coopératifs, c’est celle-ci : seul possède celui qui sait réparer… nous voici à l’opposé de la notion de propriété comme exploitation de la ressource.
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Les ateliers coopératifs comme Helios travaillent avant tout pour les générations futures. Ils contribuent à créer des individus plus autonomes et plus conscients de ce qu’ils consomment. Ils témoignent d’une génération qui décide de changer les règles et la manière de fonctionner pour se donner une chance, dans un monde qui l’a déjà condamnée. Les hacker-makers sont-ils les derniers résistants au rouleau compresseur de la société individualiste de consommation ou les pionniers du monde de demain ? Tout dépend du soutien que nous leur apporterons.
« Tout le monde est invité à nous rejoindre : des femmes au foyer, des enfants, des artistes, des ingénieurs, des personnes âgées, n’importe qui avec des mains et un esprit curieux !  » L’équipe d’Helios.
Article coopératif signé Sarah Roubato.

Des sites sur le mouvement des ateliers créatifs :
Les sites de quelques ateliers :

jeudi 15 janvier 2015

Les 5 tendances qui dessinent le futur du travail

 Source : Village

Le travail demain ? Les cinq nouvelles grandes tendances…
« Le travail n’est plus un lieu où l’on va mais une tâche qu’on a à accomplir ». Une formule qu’aime bien Xavier de Mazenot, initiateur de Ze.village (zevillage.net). Car, oui, la façon de travailler change et change vite.
Ze Village publie, en ce début janvier, la synthèse d’une étude réalisée par le Consultant Jacob Morgan (Chess Média) qui donne de façon claire et concise les cinq tendances qui dessinent le travail de demain.
   

1. Nous sommes désormais capable de construire des communautés et sommes à l’aise avec la vie publique.

2. Les technologies (cloud, big data, plateformes collaboratives) nous offrent la possibilité de nous connecter entre nous et n’importe où.

3. La génération Y va représenter 75 % de la population entrant sur le marché du travail et cette génération cherche une entreprise pour laquelle ils ont réellement envie de travailler. Les organisations doivent donc passer d’un environnement où les gens ont « envie » de travailler plutôt que « besoin » de travailler.

4. Aujourd’hui, le lieu où vous vous trouvez commence à beaucoup moins compter que vos compétences.

5. De n’importe où dans le monde on peut accéder aux mêmes types d’information que dans l’entreprise, le monde devient une énorme grosse ville.

Alors dans ce contexte quelle place pour le milieu rural ? Pour Xavier de Mazenot, il a ses chances si les collectivités arrêtent de penser immobilier d’entreprise (qui aura toute les chances de rester désert) pour penser animation d’une vie collective pour accueillir ces travailleurs d’un nouveau type.



Source : ZeVillage
Publié par: Jacob Morgan

 S’il y a une chose avec laquelle nous pouvons tous être d’accord, c’est que le monde du travail change… rapidement. La manière dont nous avons travaillé au cours des dernières années ne sera PAS celle dont nous allons travailler dans le futur. Voici 5 tendances qui vont dessiner le travail de demain.

Peut-être l’un des facteurs sous-jacents les plus importants qui mène à cette modification est l’arrivée d’un changement autour de qui décide comment le travail doit être fait.

Traditionnellement, les cadres fixent les règles aux responsables qui, à leur tour, les transmettent aux employés. Cependant, comme Dan Pink l’a judicieusement fait remarquer, « les gens talentueux ont moins besoin des organisations que l’inverse. »

En d’autres termes, les employés commencent maintenant à prendre la main sur les décisions et les conversations autour de la manière dont le travail se fait, quand, avec qui, avec quelles technologies, etc. Les prochaines années vont apporter des changements radicaux. Mais pourquoi maintenant ? Quelles sontles principales tendances qui vont conduire ce renouveau du travail ?

Nous allons voir cinq d’entre elles, et avant d’explorer plus en détail le futur du travail, il est décisif de les comprendre.

Nouveaux comportements
Il y a dix ans, si quelqu’un vous avait dit que toutes vos informations personnelles seraient publiques et que le monde entier pourrait les lire, les voir et les entendre, vous l’auriez traité de fou.

Maintenant, regardez où nous en sommes, nous sommes tellement plus à l’aise avec la vie publique, nous construisons des communautés, nous partageons, communiquons, collaborons, accédons aux informations et façonnons nos expériences personnelles.

Tous ces nouveaux comportements retombent en cascade sur les organisations qui se trouvent forcées de changer.

Technologies
Le big data, le cloud, l’internet des objets, les robots, l’automatisation, la vidéo, les plateformes collaboratives et autres technologies changent notre manière de travailler et de vivre.

Le cloud a mis le pouvoir de la technologie entre les mains des employés, les robots et les logiciels nous forcent à repenser le travail que les humains peuvent et devraient faire, le big data nous donne un aperçu de la manière dont nous travaillons et des transactions avec les clients, les plateformes collaboratives nous donnent la capacité de nous connecter entre nous et à nos informations n’importe où, n’importe quand et depuis n’importe quel support.

La génération Y sur le marché du travail
D’ici 2020, la génération Y devrait représenter environ 50% de la main-d’œuvre, d’ici 2025 les prévisions augmentent ce chiffre à 75%. Le plus important à propos de cette génération Y n’est pas le fait qu’elle puisse apporter de nouvelles approches, idées, valeurs ou styles de travail ; c’est qu’ils seront nombreux. Ils seront, la plus grande génération jamais entrée sur la marché du travail. C’est une génération d’employés à l’aise avec la technologie et qui est encline à rester à la maison jusqu’à ce qu’ils trouvent une entreprise pour laquelle ils ont vraiment envie de travailler.

En d’autres termes, les organisations doivent changer et passer d’un environnement où les gens ont BESOIN de travailler à un environnement où les gens ont ENVIE de travailler.

Mobilité
C’est absolument fascinant de voir qu’en vivant dans la Baie de San Francisco, je peux accéder virtuellement au même type d’informations qu’une personne vivant dans une rizière reculée de la Chine.

Aujourd’hui, le lieux où vous vous trouvez commence à beaucoup moins compter que vos compétences. Tant que vous pouvez vous connecter à internet, vous accédez aux mêmes personnes et aux mêmes informations que si vous étiez en train de travailler dans l’entreprise. Nous sommes connectés n’importe où nous allons aussi bien dans les airs que chez soi.

Mondialisation

C’est essentiellement la capacité des organisations de travailler dans un monde où les frontières n’existent pas. Le monde devient une seule et même grosse ville. La langue que vous parlez, la monnaie que vous utilisez et l’endroit où vos êtes situé commencent à compter de moins en moins. Vous pouvez travailler à San Francisco et avoir des clients à Pékin ou Melbourne ; il en va de même pour les employés. Les frontières explosent pour permettre de travailler avec n’importe qui et n’importe où et cette tendance ne fait que commencer.

(Traduction de l’article original The five trends shaping the future of work - Photos Sean MacEnteee etMonica Piheiro)